Intervention du Ministre des Affaires étrangères d’Arménie, Edward Nalbandian, sur les résultats des négociations avec Jean Asselborn

27 mars, 2018

Monsieur Asselborn,
Mesdames, Messieurs,

Il m’est très agréable de saluer le Ministre des Affaires étrangères et européennes de Luxembourg, mon cher ami, Jean Asselborn, à Erevan. Ce n’est pas pour la première fois que Monsieur Asselborn se rend à Erevan. Nous avons eu plusieurs occasions d’avoir des rencontres soit à Luxembourg, soit à Erevan, ainsi que dans le cadre des conférences internationales. Cette visite est une bonne occasion pour poursuivre nos discussions sur un large spectre de sujets de notre agenda bilatéral ainsi que sur des questions internationales et régionales d'intérêt mutuel.

Monsieur Asselborn a commencé son séjour par la visite, ce matin, à Tsitsernakaberd pour rendre hommage aux victimes du Génocide arménien. Profitant de l’occasion je voudrais réitérer notre haute appréciation pour la valeureuse contribution du Luxembourg à la prévention des génocides et des crimes contre l'humanité, ce qui a été particulièrement exprimée en 2015, à travers la reconnaissance du Génocide arménien, ainsi que par le soutien continu aux efforts de la communauté internationale pour la prévention de ces crimes.

Aujourd’hui, le Ministre des Affaires étrangères sera reçu par le Président de la République. Dans le cadre de sa visite, Monsieur Asselborn aura une rencontre également avec le Président nouvellement élu, et donnera une conférence dans l'École diplomatique du MAE d’Arménie.

Nous serons présents à l'ouverture du bureau du Consul Honoraire du Luxembourg en Arménie. J'espère que ce sera la première étape pour assurer la présence permanente du Luxembourg dans notre pays.

Au cours de notre entretien, nous avons abordé le développement des relations bilatérales. Compte tenu de la grande expérience du Luxembourg en matière bancaire, financière et d'assurance, je pense qu'il est important d'organiser des forums d'affaires pour promouvoir nos relations commerciales et économiques. L'ordre du jour de notre réunion comprenait des questions liées à l'élargissement du cadre juridique, aux consultations périodiques entre les Ministères des Affaires étrangères, au renforcement de la coopération sur les plateformes internationales, notamment au sein des Nations Unies, de l'OSCE et du Conseil de l'Europe.

Il a été mutuellement souligné l’importance de la coopération dans le cadre de l’Organisation internationale de la Francophonie. Dans ce contexte, je tiens à remercier le Luxembourg et personnellement Monsieur Asselborn de son soutien inconditionnel et de principe à l'initiative de tenir le 17e Sommet de la Francophonie en Arménie, qui a été manifesté lors du Sommet précédent, à Antananarivo.

Naturellement, nous avons abordé les travaux préparatoires du Sommet de la Francophonie. Je dois noter qu’aujourd’hui, nous aurons la possibilité de poursuivre nos négociations lors du déjeuner de travail et le soir.

Avec le Ministre des Affaires étrangères de Luxembourg, pays qui est un des cofondateurs de l’Union Européenne, nous avons discuté des questions relatives à la coopération entre l'Arménie et l’Union Européenne. Nous avons également parlé des opportunités offertes par la signature de l’Accord de partenariat complet et renforcé.

Nous avons évoqué les liens interparlementaires, les activités des groupes d’amitié au sein de nos parlements respectifs.

J’ai présenté à mon collègue les efforts déployés par les pays coprésidents du Groupe de Minsk de l’OSCE en vue du règlement exclusivement pacifique du conflit du Haut-Karabakh.

A présent, j’ai le plaisir de passer la parole au Ministre des Affaires étrangères de Luxembourg.

Question. Monsieur Nalbandian, Aliyev continue à insister qu'après les élections présidentielles en Azerbaïdjan, une phase de négociation active sera lancée, sur la base des idées, soit disant, «créatives» des Coprésidents. Quels seraient vos commentaires à propos de idées créatives ?

Edward Nalbandian. Vous savez, Bakou disait qu’il faudrait mener des négociations significatives, soi-disant substantielles et logiques. On dirait, jusqu’à maintenant les négociations n'étaient ni ne substantives ni logiques. Si c’est le cas, alors pourquoi le Président de ce pays prenait part aux plus de deux centaine de rencontres au plus haut niveau, si les négociations n’étaient pas substantielles ni logiques.

Alors, après avoir mené à bien la « phase logique et substantielle des négociations », ils ont procédé à une nouvelle phase, qui, selon eux, sera poursuivi sur la base de certaines propositions créatives des Coprésidents. De quelle créativité s’agirait-il ? Peut-être de la créativité dans le style de l’imagination, pour utiliser une formulation douce, pas tellement saine de l’Azerbaïdjan ?

Il s’agit de la manifestation de ce même genre de créativité, lorsque Erevan, notre capitale de 2800 ans et d’autres territoires arméniens sont proclamés territoires historiques de l'Azerbaïdjan. La menace constante du recours à la force est une autre manifestation de la créativité de Bakou. Ils ont probablement trouvé une nouvelle astuce pour expliquer pourquoi ils rejettent les propositions faites par les pays coprésidents au plus haut niveau, y compris les principes et les éléments bien connus dans leurs cinq déclarations, qui ont été élaborées dans leur ensemble. Peut-être Bakou considère que ces déclarations n’étaient pas créatives, mais plutôt primitives et simples.

Bakou se réserve le droit d'évaluer quelles propositions sont créatives, attendant que ces propositions deviennent créativement acceptables pour eux.

En réalité, le plus important c’est que Bakou se débarrasse de cette rhétorique infertile loin de la réalité et revienne dans le champ constructif, qu’il remplisse, premièrement, ses engagements et respecte les accords conclus lors des rencontres.

Lors de la dernière rencontre de Cracovie, à la proposition des coprésidents, nous avons atteint un accord sur l’élargissement des capacités de l'équipe du Représentant personnel du Président en exercice de l'OSCE. Une déclaration portant sur cet accord a été faite par les pays coprésidents, ainsi que par l'Arménie. Jusqu’à présent, l'Azerbaïdjan refuse de respecter et de mettre en œuvre et même de faire référence à ces accords.

Ce n’est pas seulement le cas de Cracovie. Cela est arrivé maintes fois auparavant. Peut-être l'Azerbaïdjan n’est pas en mesure de revenir dans le champ constructif. Dans ce cas-là, il faut le faire y revenir.

Question. Monsieur le Ministre, à la fin de la semaine dernière, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a adopté une résolution sur la prévention du génocide qui a été initiée par l'Arménie. Quelle était la motivation de l’initiative de cette résolution ?

Edward Nalbandian. Tout d’abord, j’aimerais noter qu’il est vraiment symbolique, que notre peuple, qui a survécu au génocide, à la menace de l’extermination et qui renaissant, est devenu aujourd’hui, selon la communauté internationale, un pionnier dans les efforts mondiaux visant à prévenir les nouveaux génocides et les crimes contre l'humanité.

Cette année, notre initiative est liée au 70e anniversaire de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, adoptée le 9 décembre, en 1948. Comme vous le savez, Raphael Lemkin est un des coauteurs de cette convention. Il a mis en circulation le terme génocide encore en 1944, se référant au Génocide arménien.

Et ce n’est pas par hasard que dans le cadre de ce jubilé, le 9 décembre de cette année, le jour de l’adoption de la Convention, en tant que continuation de la résolution adoptée à Genève, nous allons organiser un Forum global, dédié à la prévention des génocides. La dernière résolution adoptée à Genève réaffirme les dispositions de la Convention ce qui est très important du point de vue de la prévention. Elle met en relief que l'impunité et le négationnisme constituent des obstacles à la prévention. 

Permettez-moi de vous rappeler qu'en 2015, nous avons également initié une résolution sur la prévention du génocide, qui a été adoptée à Genève. Je voudrais surtout remercier mon collègue, le Ministre des Affaires étrangères de Luxembourg pour le soutien qu’il nous a apporté lors de l'adoption de ces résolutions. Cette fois-ci, comme en 2015, le Luxembourg est devenu coauteur de la résolution. À ce jour, 56 pays ont déjà rejoint l'Arménie en tant que coauteurs, et la résolution a été adopté par consensus. Elle est encore ouverte pour tout pays ayant l’envie de la rejoindre en tant que coauteur. Je crois qu’un nombre de pays vont la rejoindre dans les prochains jours.

Je tiens à vous rappeler qu’en 2015, par notre initiative, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté une résolution reconnaissant le 9 décembre comme Journée internationale de commémoration des victimes du crime de génocide et des crimes contre l’humanité.

J’ai déjà noté, qu’en décembre nous allons organiser un Forum global en Arménie, autour du thème d’augmentation de sensibilisation sur la Convention par le biais de l'éducation. A cet égard, je pense que la communauté internationale a encore beaucoup de travail à faire. Même 100 ans après le Génocide arménien, et 70 ans après l'adoption de la Convention, les crimes contre l'humanité continuent et, bien entendu, c'est un grand défi pour toute l'humanité. L'Arménie, en coopération avec la communauté internationale, les pays partenaires, les organisations internationales va continuer à déployer les efforts à cette fin.

Je vous remercie.

 

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